Notre Dame de Lourdes et Saint Joseph

Nous sommes à l'automne 1899, les frères avaient fait à la grande Baie, à soixante kilomètres de la mission, une pêche si abondante qu'en deux semaines ils avaient capturé vingt-quatre mille poissons. ils venaient d'entreprendre leur dernier voyage de retour. un petit vapeur les remorquait. au détour d'un cap, ils se buttèrent à une barrière de glace, si épaisse qu'elle ne pouvait être cassée. ils en conclurent que le lac était gelé jusqu'à la mission même, c'est à dire sur un espace de quarante kilomètres. La nuit descendait, et il n'était plus possible d'aller à terre. Une prière à Notre Dame de Lourdes et à Saint Joseph demanda pour le lendemain, la délivrance. Le secours d'en haut était bien leur seul espoir. N'allaient-ils pas être enclavés de toutes parts et, en attendant de pouvoir s'engager à pied sur le lac, ne mourraient-ils pas de froid ?

Quel fut le ravissement de nos bons frères, à l'apparition du jour ! La glace s'était formée, en effet, derrière eux, mais tout droit devant la proue du petit vapeur et juste aussi large qu'il en était besoin, une avenue s'ouvrait. Ils s'engagèrent, en chantant le "Magnificat". Mais, au bout de quelques kilomètres, la glace reprenait le dessus de plus en plus. Que faire ? Aller plus loin, n'était-ce pas présomption ? reculer ? Impossible. Rester là, n'était-ce pas manquer de foi ?

-Allons ! dit le frère capitaine, ce n'est pas à demi que Notre Dame de Lourdes et Saint Joseph exaucent les missionnaires et l'on poursuit encore de nombreux kilomètres vers le lac redoutable. Tout à coup, presque à angle droit, le chemin merveilleux se détourna pour les conduire en ligne droite au Gros Cap, lieu précis où l'on avait apprêté le cabestan destiné à hâler le vapeur pour son hivernement.

Pendant ce temps, toutes les flottes de pêche de la compagnie de la Baie d'Hudson et des autres commerçants se trouvaient bloquées à la grande Baie, où elles avaient suivi les missionnaires. Un de leurs bateaux, parti plus tôt, avait été emporté par le vent vers les îles Brûlées et s'était englouti avec ses douze mille poissons. Les indiens et d'autres pêcheurs avaient abordé la grève ; mais aucun poisson, cette année-là excepté ceux de la mission ne parvinrent à destination.

Merci Notre Dame de lourdes et Saint Joseph !